L'usage de la sublimation 24/09 Paris
Samedi 24 septembre 2011
de 9h30 à 16h45
Bibliothèque Nationale François-Mitterrand Petit auditorium, Quai François-Mauriac 75706 Paris cedex 13
Journée de l’Association psychanalytique de France
L’usage de la sublimation</<DIV>
Les œuvres d’art sont régulièrement sollicitées par les psychanalystes qui se plaisent à y reconnaître, comme Freud, des manifestations de l’inconscient et, en particulier, des exemples séduisants de « sublimation ». Traditionnellement la sublimation est entendue comme l’aboutissement d’un processus psychique où la pulsion est inhibée quant à son but sexuel afin de parvenir – sans perdre en intensité – à un but non sexuel, telle une création artistique. Mais la complexité et l’inachèvement de cette notion, toujours soulignés par ceux qui se sont frottés à elle, en font l’index d’un questionnement plus que le contenu d’un concept. Pour le critique, pour l’historien d’art, quel sens et quelle utilité la notion de sublimation peut-elle conserver aujourd’hui, s'agissant des arts visuels ? Est-il fécond pour eux, dans leur analyse de l’acte individuel du créateur, d’interroger les motions inconscientes par lesquelles la transformation de la pulsion aboutit à une œuvre ? La sublimation est-elle manifestée par l’œuvre dans sa matérialité ou est-ce l’interprétation qui la fait paraître ? De plus, l’œuvre d’art n’est pas seulement l’expression de la vie psychique de son auteur, elle fait aussi résonner les angoisses, les questions et les idéaux esthétiques de son époque. Doit-on dès lors s’intéresser aussi à une confrontation de la notion de sublimation avec l’histoire des tendances et des mouvements artistiques ? De fait, aux temps de la crise de la représentation, de l’attaque contre l’idée et le terme même de beauté, ainsi que du déplacement des critères qui déterminent les œuvres d’art et leur lien avec l’intériorité, il devient légitime de réévaluer les définitions de la sublimation. Cette dernière entretient peut-être des rapports de trop grande proximité avec les idéalisations pour aider à penser les mouvements de l’art dans les directions qu’il a prises depuis le XXe siècle. D’autres courants de la pensée psychanalytique ont apporté des points de vue différents sur l’activité artistique, ainsi Winnicott, qui voit dans le « jeu » la source de toute créativité, le « jeu », qui ne se laisse pas recouvrir par le concept de sublimation des pulsions, puisqu’il ne peut avoir lieu que si les pulsions ne le menacent pas. Faudra-t-il opposer créativité et création ? Songeons encore à Melanie Klein et à Jacques Lacan, pour lesquels le processus de sublimation s’inaugure du vide créé par un fantasme sadique de destruction pour l’une ou par l’effet du manque lié au signifiant pour l’autre. À moins que la réflexion freudienne ne soit, tout bien pesé, très pertinente face à la création artistique de notre temps, même lorsque celle-ci déconstruit la mimésis, la figuration et jusqu’à la figurabilité. Car le Freud de Malaise dans la civilisation souligne les liens que la sublimation est susceptible d’entretenir avec la pulsion de mort, ce qui permet d’envisager les voies par lesquelles la destructivité collabore avec les produits de la sublimation. Et si les directions prises par la modernité en art demeurent susceptibles d’une lecture freudienne, c’est peut-être aussi à la condition de considérer que l’œuvre – et le processus de la sublimation – a souvent aujourd’hui pour objet un désir de faire penser, dans le contexte culturel contemporain où l’art consiste moins en la recherche du beau ou en l’expression d’une intériorité qu’en une mise à l’épreuve, parfois transgressive, des frontières, des limites et de ce qui est représentable ou digne d’admiration.
Intervenants :
Jean Clair, Georges Didi-Huberman
Directeur de discussion :
Daniel Widlöcher
Renseignements et inscriptions :
24, place Dauphine, 75001 Paris tél : 01 43 29 85 11, courriel : lapf@wanadoo.f |