Psychanalyse du travail : du symptôme au suicide 08/01 Lille
le 8 janvier 2011 (9h - 18 h)
Skema de Lille, avenue Willy Brandt, 59000, Lille, amphi A
Programme :
9 h – Accueil des participants
9 h 15 – Introduction
Franz KALTENBECK, psychanalyste, rédacteur en chef de la revue "Savoirs et clinique"
9 h 30 – 11 h
Présidente de séance : Bénédicte VIDAILLET, maître de conférences à l’Université de Lille 1
« Aime ton travail comme toi-même ! »
Geneviève MOREL, psychanalyste, docteur en psychologie clinique et psychopathologie, auteure, entre autres, de Clinique
du suicide (sous la dir. de, Erès, 2002 et 2010)
Au moment de la grande dépression de 1929, Freud notait que « La grande majorité des hommes ne travaille que par nécessité, et les problèmes sociaux les plus difficiles proviennent de cette
aversion naturelle des hommes pour le travail » (Le malaise dans la civilisation, ch.2). La nécessité est pour Lacan une caractéristique du symptôme — ce qu’est devenu le travail pour nombre
d’analysants qui en parlent à longueur de séance. Ils ne témoignent cependant de nulle aversion mais plutôt d’une aspiration angoissée à bien faire leur travail, au-delà de tout motif rationnel
comme la peur d’être « viré » en cette période de crise. Ils en sont même si tourmentés que l’on peut se demander si « Aime ton travail comme toi même ! » n’est pas un commandement du surmoi
culturel de notre époque. Nous étudierons cliniquement les formes prises par cette idéologie du travail bien fait dans une société qui ne protège plus guère de diverses formes de précarité.
Suicide au travail : organisation du travail et responsabilité
Rachel SAADA, avocate, spécialiste de droit social, défend les familles de salariés qui se sont suicidés
Argument à préciser
11 h – 11 h 15 Pause café
11 h 15 – 12 h 45
Présidente de séance : Chantal DALMAS, psychiatre et membre de l'Aleph
« Pèse-moi ! » ou : de l’étrange désir d’être évalué
Bénédicte VIDAILLET, maître de conférences à l’Université de Lille 1, auteure de Les ravages de l’envie au travail
(2007, Prix du livre RH Science Po/Le Monde)
On ne compte plus le nombre de recherches montrant que le développement systématique des systèmes et outils d’évaluation dans de nombreuses organisations a des conséquences désastreuses :
inhibition du travail en équipe, compétition stérile, appauvrissement de l’activité, intensification du travail, production de contre-performances, etc. La plupart des personnes s’en plaignent.
Pourtant force est de constater que ces méthodes ne cessent de se développer. Nous posons l’hypothèse que ce développement fulgurant n’est rendu possible que grâce au consentement, plus ou moins
caché sinon inconscient, des salariés eux-mêmes. Ceux-ci ne sont pas simplement victimes d’un système ; ils y participent activement. A quelle demande inconsciente correspond le désir d’être
évalué ? A qui cette demande s’adresse-t-elle et que met-elle en jeu ? De « comme sortir de l’idéologie de l’évaluation ?», la problématique devient alors : « comment faire sortir de soi
l’idéologie de l’évaluation ? »
Commentaire de Chantal DALMAS : l’évaluation en psychiatrie
Présentation et projection du film « Et voilà le travail ! »
Florette EYMENIER, réalisatrice
Premier Prix au Festival de l’Acharnière (mai 2010), sélectionné au Festival Documentaire Traces de vie (novembre 2010) et au Festival Filmer le travail (janvier 2011), Et voilà le travail ! est
un film de 17 minutes, qui met en forme le travail du XXI° siècle. A partir de témoignages de travailleurs très divers - du cadre "nomade" à l'intérimaire en passant par le stagiaire ou
l’opératrice d’un centre d’appel -, des récits ont été écrits puis portés à l'écran par des comédiens. Parce qu’ils sont portés par d'autres corps, à la fois relais et alias, ces textes ainsi
devenus génériques montrent de manière saisissante combien la "nouvelle économie" trouve son principe formel dans la désincarnation même des rapports sociaux.
12 h 45 – 14 h 15 Déjeuner
14 h 15 – 15 h 45
Président de séance : Philippe SASTRE-GARAU, psychiatre, psychanalyste et membre de l'Aleph
Suicide au travail : du diagnostic à la prévention
Dominique HUEZ, médecin du travail, auteur de Souffrir au travail : comprendre pour agir (2008), Président de
l'association Santé et médecine du travail
Comment le travail peut-il nous pousser au suicide ? Quel rapport y a-t-il entre un mal de dos et un travail auquel vous pensez, chaque jour, en vous disant : « J’en ai plein le dos » ? Est-ce
une première étape qui, de fil en aiguille, va vous conduire vers l’arrêt de travail, puis, qui sait, vers une dépression et même un suicide ? A partir de mon expérience en tant que médecin du
travail depuis trente ans, j’aborderai la question du suicide au travail et de ses causes, notamment organisationnelles. Je réfléchirai également au rôle du médecin du travail, à la manière dont
il peut prévenir et dépister les atteintes à la santé du fait du travail, à la posture éthique qui peut le guider et aux moyens pratiques (travail en réseau, formation, etc.) qui lui permettent
de jouer pleinement son rôle.
Dire que non…Portrait de Bartleby en révolutionnaire
Sylvette EGO, formatrice d’adultes, membre de l’Aleph
Gilles Deleuze et Slavoj Zizek font de Bartleby, personnage éponyme d’une nouvelle de Melville, l’emblème d’une véritable alternative à la subordination dans le travail. La « formule » de
Bartleby : «I would prefer not to», et les effets qu’elle produit, sont au centre de leur interprétation. Cette promotion semble se faire au prix d’une sorte d’oubli des deux auteurs : la fin
tragique de Bartleby. Sa mort rend pourtant le récit moins « violemment comique » que ne le dit Deleuze et laisse perplexe sur la portée révolutionnaire du renoncement de Bartleby que pose Zizek
; même si tous deux s’accordent finalement à voir de la violence dans ce que crée le personnage. S’il n’est guère possible de faire une analyse du personnage Bartleby en termes de structure
psychique, puisqu’il parle si peu, il peut être intéressant d’interroger ce qui engage les deux auteurs à situer l’alternative au processus capitaliste dans la souffrance d’un « au moins un
» qui le mettrait en cause.
15 h 45 – 16 h Pause café
16 h – 17 h 45
Président de séance : Jean-Claude DUHAMEL, psychologue clinicien et membre de l'Aleph
Le travail, un possible anti-dépresseur ?
Aurélien ROCLAND, auteur – réalisateur, co-auteur de la série documentaire 1000 chercheurs parlent d'avenir
En octobre dernier, 21 chercheurs de tous horizons ont été interrogés à propos de leur métier et de leur vision de l'avenir. Quels mots ont-ils choisi face à la caméra ? Le résultat inattendu de
cette rencontre entre l¹art et la recherche est
assurément l¹émergence quasi-systématique d¹une subjectivité où transparaît
le point d'appui que peut constituer le travail pour les individus lorsque celui-ci leur apporte une satisfaction évidente.
Grâce au lien aux autres qu'il organise et qu'il soutient et parce qu’il reste en lien avec le désir, le travail, dans ce cadre particulier apparaît comme le meilleur antidépresseur qui soit.
Le travail n'est pas sans risque
Dr Emmanuel FLEURY, psychiatre, psychanalyste, Lille
Comment passe-t-on de la « sécurité sociale » (Conseil National de la Résistance, 1944) aux « risques psycho-sociaux » du rapport Légeron et Nasse en 2008 ? Disons-le tout net, alors que les
firmes comme Apple affichent une fraternité qui cache mal la tyrannie régnant dans ses ateliers délocalisés en Asie (Foxconn), la prévention des risques plonge l'idéal de sécurité dans l'horreur
de l'esclavage. L'histoire d'un cadre travaillant dans une institution publique en voie de privatisation me permettra de montrer la dangereuse glissade de la « sécurité » au « risque » qui a
manqué de l'entrainer dans la destruction pure et simple.
Renseignements pratiques :
Lieu Skema de Lille, avenue Willy Brandt, 59000 Lille (Euralille), amphi A
Participation aux frais 30€ (10€ pour les étudiants et les demandeurs d’emploi)
Renseignements www.aleph.asso.fr