A la découverte de Szondi Schotte 11/12 Wimille (62)
Pour aller à la découverte de Leopold Szondi et Jacques Schotte nous invitons Dominique Reniers, responsable de l'enseignement de la psychopathologie à l'Institut Catholique de Lille qui avait effectué sa thèse (ci-dessus) en rapport avec l'oeuvre de Szondi. Pas besoin d'y connaitre quoi que ce soit pour participer à cette journée !!
En présentation, voici un extrait d'un texte de Jean Mélon sur Szondi
Nicolas Abraham, qui fut son compatriote, a dit un jour de l’œuvre de Szondi : « Ce n'est pas tout à fait de la psychanalyse, mais, comme traité de psychiatrie, c'est le seul qui vaille la peine d'être lu ».
Cette phrase d'humeur mérite qu'on lui fasse un sort, dans le bon sens du terme. Elle situe assez bien la position de Szondi.
Contrairement à ce qu'on lit habituellement dans les dictionnaires et les encyclopédies qui le mentionnent, Szondi n'a jamais été psychiatre, du moins officiellement, c'est-à-dire académiquement reconnu comme tel; ni davantage psychanalyste dans le sens où on chercherait vainement son nom dans le Roster de l'Association Psychanalytique Internationale. Il fut interniste, plus spécialement endocrinologue. Mais la psychopathologie fut toujours son violon d'Ingres.
Il est exact que de 1927 à 1941 il a dirigé un laboratoire de psychologie à l'Université de Budapest, dans le service de Ranschburg qui, de toute évidence, fut un patron libéral.
C'est dans ce cadre universitaire qu'il entreprendra ses recherches généalogiques et qu'il mettra au point son test de « Diagnostic des pulsions » (Triebdiagnostik). Bien que le test n'ait été édité qu'en 1947, sa mise au point définitive fut réalisée aux alentours de 1935.
Si l'intuition du schéma et du « système pulsionnel » (Triebsystem) appartient en propre à Léopold Szondi - qui a toujours déclaré ironiquement l'avoir découvert en rêve - l'élaboration du test fut le produit d'une œuvre collective. En effet, dans les années 30, Szondi était entouré d'une équipe de jeunes chercheurs aussi brillants qu'enthousiastes. L'ouvrage de Susan Deri (1949) témoigne de ce bouillonnement intellectuel.
Il est toutefois nécessaire de rappeler que, parallèlement à cette activité universitaire intense, Szondi a continué d'exercer la pratique privée d'endocrinologue qui constituait son gagne-pain.
On imagine volontiers qu'il a subi l'influence, et bénéficié de l'effervescence intellectuelle du cercle célèbre des premiers psychanalystes hongrois, « enflammés » par le génie de Sandor Ferenczi. Mais on ne sait rien de précis à ce sujet, sinon que son principal contact avec la psychanalyse passait par Imre Hermann, l'« ermite de Buda » que Freud avait surnommé « notre philosophe ».
Il est incontestable qu'il y a chez Szondi une préoccupation anthropologique fondamentale. C'est sans doute pourquoi son œuvre a, jusqu'ici, trouvé un écho plus favorable chez les philosophes (Henri Niel, Alphonse De Waelhens, Henry Maldiney) que chez les psychanalystes et chez les psychiatres, qu'elle interpelle pourtant au premier chef. Il est remarquable qu’Henry MALDINEY, un des penseurs les plus extraordinaires de notre siècle, ait d’emblée adopté le système szondien comme référence analytique majeure, sans émettre à son égard la moindre critique.
Freud, on le sait, était allergique à l'esprit de système, jugé suspect de paranoïdie. Il s'est toujours refusé à dénombrer les pulsions, se limitant à un dualisme (trop) simple : pulsions sexuelles/pulsions du moi et pulsions de vie/pulsions de mort, avec les topiques qui leur correspondent et qui sont tout aussi peu satisfaisantes : inconscient/préconscient/conscient et ça/moi/surmoi. Ce parti-pris d'indétermination le conduit nécessairement à reconnaître que «ce qui manque le plus à la psychanalyse, c'est une doctrine des pulsions» (1927). Mais comment pouvait-il en être autrement, du moment qu'il avait proclamé : «La doctrine des pulsions est notre mythologie», abandonnant lesdites pulsions à leur «indétermination grandiose»? Cette ambiguïté n'est pas étrangère au flou conceptuel dans lequel continuent de baigner un grand nombre de notions psychanalytiques.
Or, c'est ce but précis qui a été visé par Szondi. A travers la constitution de son schéma pulsionnel, il a eu l'ambition de produire une authentique «doctrine des pulsions » (Trieblehre). Il l'affirme explicitement dans l'introduction de la première édition du «Traité du diagnostic expérimental des pulsions» (1947)
En 1969, Szondi fut gratifïé d'un legs considérable qu'il devait consacrer à la fondation d'un Institut destiné à former des psychothérapeutes. L'enseignement qu'on y a dispensé depuis n'était pas sans valeur, mais c'est peu dire que les théories szondiennes y étaient laissées dans l'ombre. On en parlait bien un peu, mais seulement de peur que le « patron » ne s'aperçoive qu'on faisait tout pour faire oublier son existence. Se présenter comme szondien n'a jamais fait recette. Szondi qui, faut-il le dire, avait atteint les 80 ans, n'avait d'ailleurs pas de réel pouvoir dans l’institution qu’il avait lui-même fondée.
Grâce en soit rendue à Jacques Schotte, il fut quand même nommé Docteur Honoris Causa des deux prestigieuses Universités de Louvain (1969) et de Paris (1975). Ils sont nombreux hélas, ceux qui ayant largement bénéficié de l’inspiration szondienne, ont ensuite jeté le maître aux orties pour la seule raison que mentionner Szondi, c’est courir le risque de voir sa carrière universitaire définitivement brisée.
De ce péché-là, ceux qui sont ici aujourd’hui sont aussi définitivement lavés. Et de cette fidélité-là, quand bien même il ne nous resterait rien d’autre, nous avons le droit d’être fiers et de nous adresser ce compliment entre nous, puisqu’ailleurs ça n’a pas de sens.
« Le» Szondi ne serait plus aujourd'hui qu'un test parmi d'autres, et des plus farfelus, si le schéma pulsionnel n'avait rencontré en Jacques Schotte le seul esprit qui, en son temps, l'ait véritablement pris au sérieux.
Quand il rencontre Szondi à la fin des années cinquante, Schotte entreprend de convaincre le maître de l'excellence de sa découverte.
Le style dogmatique de Szondi, qui lui a fait tellement de tort, nous apparaît comme le contrepoids malheureux de son incertitude épistémologique.
Il aura fallu toute l'énergie de Schotte pour convaincre Szondi lui-même qu'il avait découvert le meilleur modèle possible pour penser le champ psychopathologie dans sa spécificité propre, que le modèle szondien avait cette qualité tout à fait inédite, d'être un modèle «auto-logique».
La confrontation Szondi-Schotte aboutira à la publication de la Notice pour introduire le problème structural de la Schicksalsanalyse(1964) qui est un manifeste. Une aventure intellectuelle commence. Elle se poursuit aujourd'hui sans bruit, mais avec une vigueur qui vaut bien celle de l'Ancêtre.
A la découverte de Szondi et Schotte ou …Szondi et Schotte pour les nuls
Samedi 11 Décembre 2010 10h30 à 12h30 et de 14h à 17h30 à l’IEP de Wimille, 2 route de la trésorerie (62)